Hervé Chatot :
Notre invitée aujourd’hui est professeure à l’université Paris Dauphine, directrice scientifique de la chaire économie du climat et économie du gaz, c’est Anna Créti.
Bonjour, Anna, je suis très heureux de vous accueillir à La Française aujourd’hui. Vous êtes chercheuse à l’école polytechnique à l’université de Berkeley aux États-Unis, brillante spécialiste de l’économie de l’énergie et de la géopolitique des matières premières, vous êtes aussi l’auteure de très nombreuses publications scientifiques dans des revues internationales.
La thématique du climat est aujourd’hui au coeur de l’agenda politique et devient également une priorité pour les investisseurs. La prochaine conférence sur le climat, la COP26 qui se tiendra à Glasgow en novembre s’annonce probablement comme la plus importante depuis ses débuts. Rares sont les pays qui ont respectés leurs promesses et les objectifs de l’accord de Paris. Les politiques actuels conduisent à un réchauffement climatique nettement supérieur à deux degrés.
Quels sont selon vous les conditions nécessaires pour que les négociations internationales sur le climat puissent fonctionnées ?
Anna Créti :
Il est vrai que la COP26 est une COP décisive dans la mesure où il va y avoir l’étape de vérification des engagements pris par les différents pays depuis celle de 2015.
Aujourd’hui, sur 187 pays signataires de l’accord de Paris seulement 48 ont fait l’exercice prévu, c’est-à-dire de refaire leurs engagements vis-à-vis des politiques climatiques à long terme. Et donc une large partie des pays ne se sont pas prêtés à cet exercice. On part déjà sur une COP à deux vitesses.
Les pays qui ont pris au sérieux cette échéance, en particulier des pays européens, et les pays qui attendent probablement de voir ce que ces pays ambitieux vont proposer pour éventuellement se rallier à ce « club » des pays leaders dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais malgré cela, même en prenant en compte les nouveaux engagements qui vont plus loin par rapport à la première mouture suite à la COP21, nous sommes toujours loin du compte par rapport à ce qu’on appelle les emissions gap, c’est-à-dire, l’effort nécessaire pour garder une trajectoire de réchauffement climatique inférieur à 2 degrés pour ne pas parler de celui à 1,5.
Aujourd’hui déjà on calcule une empreinte des accords en l’état qui porterait à un réchauffement supérieur 3 degrés.