La Française Real Estate Managers (REM) a très tôt acquis la conviction que les critères environnementaux et sociaux sont des facteurs aussi déterminants que les critères financiers dans la valorisation des actifs immobiliers. Cette conviction repose sur une évidence : un immeuble géré de manière durable est plus attractif pour les locataires, il réduit les risques d’obsolescence techniques et réglementaires, et se montre plus résilient face aux risques climatiques.
« Le véritable enjeu réside dans la traduction financière de ces bénéfices. Quantifier la valeur nette additionnelle issue d’une meilleure performance environnementale est indispensable. » explique Virginie Wallut, directrice de la Recherche et de l’ISR de La Française REM. Sans quantification en euros, il peut être difficile de justifier les investissements nécessaires aux transitions environnementales et sociétales. Les capex verts représentent souvent des montants élevés. Mal perçus, ils peuvent apparaitre comme un coût ou une contrainte. En réalité, ils constituent un levier de performance économique et financière.
Conscients de cet enjeu, les experts se sont saisis du sujet. Ils se sont organisés pour structurer la collecte de données ESG, première étape indispensable pour les intégrer dans leurs méthodes de valorisation. Certains valorisent déjà les économies de charges ou la réduction de vacance générées par une meilleure efficacité énergétique pour optimiser les revenus locatifs.
La Française REM s’est associée à Cushman & Wakefield pour mener un premier test sur les plans d’actions de 15 immeubles totalisant 100 000 m². Pour objectiver cette valeur, Cushman & Wakefield intègre, pour chaque actif, les principaux indicateurs environnementaux et réglementaires (évolution des consommations et des émissions de CO₂, trajectoire au regard du décret tertiaire, DPE, certifications) dans le processus de valorisation. Cette approche relie directement l’efficacité énergétique et la résilience réglementaire à l’attractivité locative et aux paramètres de valorisation, en s’appuyant sur des benchmarks[1] de place, notamment le positionnement par rapport à la taxonomie européenne. Lorsque la trajectoire d’amélioration est avérée, les gains sur charges d’exploitation se traduisent par une meilleure compétitivité locative reflétée dans les évaluations.
Cette méthodologie, quantifiée, fondée sur les données et alignée avec les pratiques d’expertise, permet d’identifier et de mesurer la création de valeur liée aux performances environnementales, contribuant au résultat mesuré d’environ 8 M€ sur le périmètre étudié, soit une hausse moyenne de 2 % des valeurs des actifs — preuve que la durabilité est un levier tangible de performance immobilière. A titre d’illustration, à Lyon, Cushman & Wakefield a revalorisé de 2,5 % la valeur locative (VLM) d’un immeuble de 17 000m² ayant réduit ses consommations d’énergie de 21% en 5 ans. Cette performance a été atteint grâce à une rénovation technique incluant pompes à chaleur géothermiques et nouvelles centrales de traitement de l’air (CTA). A Sèvres, un contrat de performance énergétique sur un immeuble de 17 000m² a conduit à dépasser les objectifs 2030 du décret tertiaire, justifiant un ajustement favorable de 15 points de base du taux de capitalisation[2] retenu par l’expert. Les survaleurs constatées restent encore limitées puisqu’elles reposent uniquement sur la dimension énergétique des critères ESG. D’autres facteurs – comme la résilience aux risques climatiques ou la qualité de vie au travail – pourraient également influer sur les loyers à l’avenir.
[1] OID, Deepki
[2] Rapport entre le revenu locatif annuel et la valeur vénale de l’actif